4 Mai 2025
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par TRT Global
Haïti commémore un bicentenaire particulier, celui d’une dette. Le 17 avril 1825, le roi Charles X signe une ordonnance qui impose à la nouvelle république indépendante le paiement de 150 millions de francs-or pour indemniser les anciens colons.
Suite à une ordonnance du roi Charles X du 17 avril 1825, Haïti a dû payer 150 millions de francs-or pour indemniser les anciens colons et poursuivre «les échanges commerciaux privilégiés en faveur de la France».
Depuis des décennies, les Haïtiens, soutenus par une coalition internationale, réclament à la France le remboursement de cette dette, au nom de la réparation et de l’égalité entre tous les êtres humains.
De nombreux observateurs considèrent cette dette comme l’un des facteurs du déclin socio-économique et politique d’Haïti au cours des deux derniers siècles. Le pays, qui comptait 12 millions d’habitants en 2021, est considéré comme «l’un des plus inégalitaires de la planète, avec un coefficient de Gini de 0,61 en 2012», marqué par la paupérisation et la marginalisation.
C’est aujourd’hui le pays le plus pauvre de l’hémisphère occidental. Plus de 6 millions d’Haïtiens vivent sous le seuil de pauvreté (avec moins de 2,41 dollars par jour) et plus de 2,5 millions sous le seuil de la pauvreté extrême. L’Indice de Développement Humain (IDH) est non seulement faible, mais aussi en recul depuis 2006 (149e rang cette année-là,159e en 2010, 161e en 2012, 168e sur 189 pays en 2018 et 158e rang sur 193 en 2023. Cette situation socio-économique, au-delà des errements politiques internes, a, selon de nombreux experts, un lien avec la dette coloniale imposée en 1825.
Depuis son indépendance, proclamée le 1er janvier 1804, Haïti a connu des dictatures, des régimes autoritaires sanglants, des ingérences étrangères et des gouvernements de «rapaces» (Charles, 1994) qui gangrènent durablement la vie sociopolitique et creusent encore plus les inégalités sociales séculaires. À cela, s’ajoutent les successives catastrophes naturelles (séismes, ouragans, cyclones, inondations, etc.) et les épidémies qui, depuis un demi-siècle, plongent la population dans une précarité permanente et plombent les politiques publiques de développement.
Avec l’assassinat du président Jovenel Moïse le 7 juillet 2021, la situation sociopolitique et économique du pays s’est aggravée, livrant Haïti aux mains de gangs, dans un climat d’insécurité généralisée : enlèvements, assassinats et impunité sont le lot quotidien des Haïtiens.
L’objet de ce texte, dans une perspective sociohistorique, est d’examiner comment la «première république noire» indépendante, issue d’une lutte acharnée contre l’esclavage transatlantique, a payé le prix fort pour sa résistance.
La lutte pour l’indépendance
Durant cinq siècles (XVe-XXe), la traite transatlantique, l’esclavage et la colonisation furent des périodes d’ensauvagement, de déshumanisation, de domestication de l’altérité, d’ethnocide (R. Jaulin) et de réduction de l’autre au même, de restriction des espaces de liberté. Aimé Césaire, évoquait déjà, dans son Discours sur le colonialisme, ce face-à-face mortifère : «Une civilisation qui ruse avec ses principes est une civilisation moribonde».
La question de l’altérité, du regard sur l’autre, est inséparable du système esclavagiste et des abolitions commémorées ici et là. C’est au nom de la domination, au nom de l’infériorisation de peuples, que l’on a assisté à leur exploitation avec le profit au cœur de cette activité. Avec la déportation massive, systématique et très profitable de millions d’êtres, via le «commerce triangulaire», «l’anéantissement des Noirs» s’est poursuivi dans l’univers concentrationnaire américain.
Tel est le contexte dans lequel se situe l’histoire d’Haïti, découverte en 1492 par Christophe Colomb, et où, dès 1503, les premiers Africains furent amenés dans l’île d’Hispaniola, marquant le début effectif de l’esclavage des Noirs. La France s’y implante à partir de 1625 avec une reconnaissance par l’Espagne en 1687 de sa possession d’une partie de l’île.
L’année 1785 marque l’apogée de la traite négrière sur l’île, avec l’arrivée d’environ 40 000 esclaves venus d’Afrique chaque année.
Quelques années plus tard, avec la Révolution française de 1789, les planteurs blancs de Saint-Domingue en profitent pour exiger plus d’autonomie. Cette même année, le 26 août 1789, la France proclame la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen. Comme le souligne Louis Sala Molins, «sous les Lumières, l’outrage», tandis qu’à Paris, se forme le «Club de l’Hôtel Massiac», organe de défense des intérêts coloniaux, formé principalement par de grands planteurs de Saint-Domingue où on recense 783 sucreries, 3117 caféteries, 3152 indigoteries et 789 cotonneries. Le commerce y suit une logique cynique : la verroterie est échangée contre des esclaves noirs, les esclaves contre du sucre et du café, revendus ensuite en échange de monnaie.
À partir de 1790, sous la houlette de Vincent Ogé et Chavannes, débutent des insurrections pour les droits des libres de couleur. La répression est violente et se traduit par l’arrestation des deux hommes. En France, on assiste la même année à la création le 2 mars, au sein de l’Assemblée nationale constituante, d’un «Comité colonial» entièrement contrôlé par les colons et les armateurs, qui sera désormais en charge de la politique coloniale de la France. Le 8 mars 1790, un décret institue des «Assemblées coloniales» dans chaque colonie, composées exclusivement de colons, avec de larges pouvoirs d’administration intérieure des colonies.
Les colons de Saint-Domingue obtiennent une quasi-autonomie coloniale qui marque l’apogée de leur puissance politique. Ceci ne laisse pas indifférents les esclaves, qui organisent au mois d’août 1791, sous la conduite de Bouckman, Jean-François et Biassou, une insurrection. Ils sont rejoints par Toussaint Louverture, marquant le début de la guerre contre les planteurs esclavagistes.
Le 24 septembre 1791, sous la pression des planteurs, les députés français abrogent le décret accordant les droits politiques aux libres de couleur. Dans cette période mouvementée, le 28 septembre, la Constituante abolit l’esclavage en France, «où il n’y a pas d’esclaves».
Après une lutte acharnée, le 3 juillet 1801, Toussaint Louverture promulgue une «Constitution de Saint-Domingue» qui fait de la colonie un État quasi souverain, disposant d’une large autonomie interne et de la faculté de négocier des traités de commerce avec les puissances étrangères.
Toussaint Louverture est désigné gouverneur à vie de la colonie et instaure un régime personnel et autoritaire.
En 1802, Toussaint Louverture est déporté en France et séparé de sa famille. Il meurt le 7 avril 1803 au fort de Joux.
De l’origine de la «dette» haïtienne
Au sortir des abolitions, dans différents pays, la question de la «réparation» a été posée. Il s’agit souvent d’un face-à-face des mémoires, avec la défaite des vaincus dont la liberté a été arrachée. Selon François Blancpain et Marcel Dorigny dans Restitution de la dette de l’indépendance, «Dès la première Restauration, en 1814, la France tenta, par des négociations, de faire revenir Haïti dans le giron des colonies françaises. Les Haïtiens refusèrent catégoriquement toute sujétion française, même purement nominale, mais proposèrent par la voix de leur président Alexandre Pétion, le versement d’une indemnité «raisonnablement calculée» pour indemniser les colons».
Il faut remettre cette assertion autour de pseudo-négociations dans un contexte historique où des canons avaient été placés face aux côtes haïtiennes, avec une menace de blocus total : «C’est une armada de 14 bâtiments de guerre armés de 528 canons».
C’est sous la menace que le président Jean-Pierre Boyer a pris cette décision afin de préserver des vies humaines.
Entre 1815 et 1823, différentes manœuvres françaises et négociations avec son ancienne colonie de Saint-Domingue ont lieu. Face à l’intransigeance haïtienne, des négociations sont menées le 16 août 1823 à Bruxelles autour d’un «traité de commerce qui devait avoir pour base la reconnaissance de l’indépendance nationale» (cf. projet REPAIRS). «Haïti propose de calculer l’indemnité sous la forme d’un abaissement des droits de douane sur les produits français, soit une somme totale de 15 à 20 millions sur dix ans». Refus de la France, qui souhaite le maximum des «indemnisations».
Sous la menace du feu, le 11 juillet 1825, le Sénat haïtien autorise le président Boyer à ratifier l’ordonnance de Charles X datée 17 avril 1825. Elle est constituée de trois articles et d’un préambule saisissant :
«Charles, par la grâce de Dieu, Roi de France et de Navarre, à tous présents et à venir, Salut.
Vu les articles 14 et 73 de la Charte, Voulant pourvoir à ce que réclament l’intérêt du commerce français, les malheurs des anciens colons de Saint-Domingue et l’état précaire des habitants actuels de cette île, Nous avons ordonné et ordonnons ce qui suit :
Article 1. Les ports de la partie française de Saint-Domingue seront ouverts au commerce de toutes les nations. Les droits perçus dans ces ports, soit sur les navires, soit sur les marchandises, tant à l’entréequ’à la sortie, seront égaux et uniformes pour tous les pavillons, excepté le pavillon français en faveur duquel ces droits seront réduits de moitié.
Article 2. Les habitants actuels de la partie française de Saint- Domingue verseront à la Caisse générale des dépôts et consignations de France, en cinq termes égaux, année en année, le premier échéant le 31 décembre 1825, la somme de cent cinquante millions de francs, destinée à dédommager les anciens colons qui réclameront une indemnité.
Article 3. Nous concédons, à ces conditions, par la présente ordonnance, aux habitants actuels de la partie française de Saint-Domingue, l’indépendance pleine et entière de leur gouvernement».
La dette imposée par la France
Ces indemnités de pertes sont calculées sur les principales productions du commerce triangulaire, issues du travail des esclaves : c’est le principe de la double peine ou de la «double dette». Comme le souligne Louis-Philippe Dalembert : une envers l’État français pour indemniser les anciens colons et l’autre auprès des banquiers parisiens.
Contrairement à des commentaires malencontreux effectués par différents auteurs sur les articles 1 et 2, c’est le préambule de l’ordonnance qui donne l’entière mesure de la volonté française : au-delà de la défense de ses intérêts commerciaux, il s’agit de poursuivre sa domination, sa mission civilisatrice et sa domestication de l’altérité par la minorité.
Il faut se rappeler qu’en 1753, à Saint-Domingue, sur un total de 172 000 habitants, il y a 154 000 esclaves. Il fallait faire payer à Haïti l’affront et faire un exemple, d’autant plus qu’en 1814, la France possédait encore d’autres colonies dans lesquelles elle maintenait l’esclavage.
Cet acte constitue l’approbation par la France – pays qui se targue d’être le berceau de la Déclaration des droits du citoyen (1789) – d’une paix violente : oui à la liberté, mais dans l’ordre impérialiste. L’acte traduit également la continuation de la dépendance d’Haïti vis-à-vis de la France car les premières tranches de l’inique indemnisation furent payées par un «emprunt placé à Paris».
Durant des décennies, au prix d’énormes efforts, la jeune nation haïtienne a réglé intégralement «la dette», qui fut soldée en 1883. Cet accord de dupes permet à la France de «contrôler les finances» haïtiennes jusqu’en 1915, au moment de l’invasion des États-Unis. Si les dates divergent selon les différentes sources, il faut indiquer que ce n’est qu’en 1947 ou 1952 que les différents «emprunts et intérêts auprès des banques françaises, puis étasuniennes», seront clos.
Une affaire de nègres : pas de réparation pour Haïti…
Les revendications haïtiennes ont été permanentes depuis l’inique accord de 1825. Elles vont s’amplifier durant le XXe siècle et au début du XXIe avec l’émergence d’un mouvement mondial de la société civile autour des réparations de la colonisation. Nous présentons ici trois exemples.
À l’occasion du bicentenaire d’Haïti et de la mort de Toussaint Louverture, le président de la République Jean-Bertrand Aristide exige le paiement par l’ancienne puissance coloniale de la «dette de l’indépendance» : «S’ils sont conscients de leurs actes criminels, ils doivent remettre cet argent», clame-t-il.
Pour museler «l’agitateur haïtien», la France crée unilatéralement un Comité de réflexion et de propositions sur les relations franco-haïtiennes, avec à sa tête Régis Debray. Ce philosophe et essayiste, ex-révolutionnaire et ex-compagnon de Che Guevara en Bolivie en 1967, est subitement propulsé spécialiste d’Haïti. Présentant les conclusions de sa mission au ministre des Affaires étrangères Dominique de Villepin en janvier 2004, l’ex-révolutionnaire en mission commando, soutient tout naturellement qu’il n’est pas question de restituer quoi que ce soit, vantant les mérites de l’action française à Haïti. Il écrit à la page 13 de son rapport : «Le droit international exige qu’un acte ou un traité soit apprécié au regard du droit en vigueur au moment où cet acte ou ce traité se sont produits. Il est certes à nos yeux scandaleux que Haïti ait dû en quelque sorte acheter en francs/or sa reconnaissance internationale après avoir conquis son indépendance au prix du sang, mais faut-il rappeler que le droit à l’autodétermination des peuples n’existait pas en 1838 ? Pas plus que la notion de crime contre l’humanité, née au lendemain de la Deuxième Guerre mondiale».
Régis Debray omet 1789 et la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen. Il pousse le bouchon et inverse la donne : les ex-esclaves doivent payer le prix de leur mutinerie, de leur liberté car ils ont tué «d’innocents esclavagistes». Il n’évoque guère la violence du système esclavagiste concentrationnaire, ce «génocide le plus glacé de l’histoire» comme l’évoque Louis Sala-Molins, professeur de philosophie politique à l’Université de Paris I dans «Tuez-les tous ! La France nourrira ses chiens».
Un exemple de la violence coloniale est relaté, concernant le gouverneur Rochambeau dont la «cruauté est sans nom» qui demandait de donner des nègres à manger à ses chiens, dans un élan de négromachie : «Les filles des esclaves étaient violées en pleine enfance. Une fois sur cette voie, on en vint vite aux horreurs. Les jours de fête, Rochambeau fit dévorer des nègres par des chiens, et quand les crocs ne se décidaient pas à lacérer un corps humain devant tant de brillantes personnes vêtues de soie, on donnait un coup d’épée à la victime, pour que le sang coulât, bien appétissant. Estimant qu’ainsi les Noirs se tiendraient tranquilles, le gouverneur avait envoyé chercher des centaines de mâtins à Cuba : «On leur fera bouffer du Noir !»»
La France dans le déni
Belle inversion des faits historiques, de leur analyse : des déportés colonisés, esclavagisés doivent se repentir de s’être libérés de la France, pays de la Déclaration des droits de l’homme…
Pour Régis Debray et l’ensemble des gouvernements français, nulle peine de porter l’affaire en justice : «Le droit international ne résout pas tout. Circulez ! Il n’y a rien à voir». Comme le souligne Bassidiki Coulibaly, philosophe qui a écrit Du crime d’être noir : «Je t’esclavagise, je te colonise : tu es mon ami».
Poursuivant ses propos macabres, Régis Debray évoque la sagesse de la loi française de 2001, qui reconnaît l’esclavage comme crime contre l’humanité, sans pour autant «ouvrir la boîte de Pandore des indemnisations (versées à partir de quand, par qui, à qui, et selon quels critères ?)» . Ce que Régis Debray oublie de dire, c’est que, dans le texte initial de Christiane Taubira, la question des réparations financières est clairement posée. Le texte a été expurgé pour pouvoir être voté par la frange conservatrice du Parlement français. Il oublie également d’évoquer les règlements des deux guerres mondiales, où l’Allemagne a versé des dommages de guerre aux vainqueurs, dont la France. Il oublie d’évoquer les indemnisations du Canada en faveur des Amérindiens ou de la Nouvelle-Zélande envers les Aborigènes.
La France, fidèle à sa politique séculaire, concède certes à l’opprimé «nègre» sa liberté, mais réfute toute responsabilité dans les souffrances infligées, sauf que cela se passe pourtant dans le «siècle des Lumières».
Au sortir de cet épisode de 2004, suite au rapport de la figure morale Régis Debray, aucun centime ne sera versé.
Bien plus, en mars 2004, la France a contribué à l’éviction de Jean-Bertrand Aristide, qui a été embarqué pour Bangui, en République centrafricaine. Elle s’est ensuite empressée de reconnaître l’autorité du nouveau Premier ministre Latortue, plus favorable et qui ne parle plus de restitution, ni de réparation. Malgré la fin de non-recevoir de la France, en 2010, le groupe de soutien au Comité pour le remboursement immédiat des milliards envolés demandait à Nicolas Sarkozy, en visite à Haïti, dans une tribune publiée dans le journal Libération, de rendre à Haïti «son argent extorqué». Le président français Nicolas Sarkozy, revenant sur l’histoire commune entre les deux pays, indiquait : «Notre présence ici, a-t-il dit, n’a pas laissé que de bons souvenirs (…) Même si je n’ai pas commencé mon mandat au moment de Charles X, j’en suis quand même responsable au nom de la France».
La malédiction de la dette
Un peu plus tard, en 2015, François Hollande avait, lui, évoqué une «dette morale» envers Haïti. Plus récemment, en avril 2024, lors du Forum permanent des Nations unies pour les personnes d’ascendance africaine (PFPAD) à Genève, une coalition d’une vingtaine d’ONG et de membres de la société civile at de nouveau porté le fer contre la France. Leur action a obtenu l’assentiment de Volker Turk, Haut-Commissaire des Nations unies aux droits de l’homme : «Je me joins aux demandes d’action immédiate. En matière de réparations, nous devons enfin entrer dans une nouvelle ère. Les gouvernements doivent faire preuve d’un véritable leadership en s’engageant sincèrement à passer rapidement de la parole aux actes, afin de réparer les torts du passé». Car, comme le souligne l’économiste Benoît Joachim, cette dette, cette «rançon de l’indépendance», est l’une des sources du mal-développement d’Haïti.
À ce propos, Sir Spenser Saint-John, ancien ministre résident et consul général britannique à Haïti, indiquait déjà en 1885, dans son ouvrage Haïti ou la République noire, que «cette maudite dette envers la France a causé la moitié des malheurs d’Haïti».
La France et l’esclavage, «un crime sans responsable ni coupable»
Au sujet de la France, il est important de souligner que, le 4 février 1794, peu après la Révolution française de 1789, la Convention avait décrété l’abolition de l’esclavage : «Réparons ce tort, citoyens, proclamons aujourd’hui la liberté des Nègres». Toutefois, l’esclavage et la traite furent rétablis en 1802 et en 1805, le Code noir est réaffirmé dans les colonies.
Dans la même veine, il faut noter qu’un an après l’abolition de l’esclavage en 1848, l’Assemblée nationale française a voté, en 1849, une indemnité de 120 millions de francs aux anciens propriétaires d’esclaves. Bien plus tard, en décembre 1998, au début des débats qui ont conduit à l’adoption de la loi Taubira le 21 mai 2001, on peut lire sans ambiguïté, dans «l’exposé des motifs» de la proposition de loi, une évocation impartiale du crime contre l’humanité et des moyens de réparer : «Il n’existe pas de comptabilité qui mesure l’horreur de la traite négrière et l’abomination de l’esclavage. Les cahiers des navigateurs, trafiqués, ne témoignent pas de l’ampleur des razzias, de la souffrance des enfants épuisés et effarés, du désarroi désespéré des femmes, du bouleversement accablé des hommes. (…) Ils ignorent l’effroi de l’entassement à fond de cale. Ils gomment les râles d’esclaves jetés, lestés par-dessus bord. Ils renient les viols d’adolescentes affolées. (…) Ils dissimulent les assassinats protégés par le Code noir».
Dans sa proposition de loi, Christiane Taubira souhaitait «instaurer un comité de personnalités qualifiées pour déterminer le préjudice subi et les conditions de réparations». Mais comme le constate à juste propos Louis Sala-Molins, après les débats parlementaires et la frilosité des uns et des autres à nommer le crime et ses responsables, la loi votée fut expurgée de son essence.
«Au final, l’esclavage et la traite négrière sont des crimes sans coupables ni responsables». «Ce sont des «nègres» ! C’est pourquoi l’on peut bien se contenter de réparations morales, appelées excuses, repentances, regrets, etc. C’est déjà ça de pris, après des siècles de «déni d’humanité»». C’est dans cette lignée qu’il faut lire le mépris français, qui se retrouve à la fois dans le discours de Dakar de Sarkozy ou dans les récents propos d’Emmanuel Macron, qualifiant en 2024 les hommes politiques haïtiens, de «cons».
Une lueur d’espoir ? Suite à la rencontre du 29 janvier 2025 à Paris entre Emmanuel Macron et Leslie Voltaire (président du Conseil présidentiel de transition haïtien), un communiqué de presse de l’Élysée a évoqué la reprise de bonnes relations entre les deux pays. Rien n’est véritablement dit sur la question de la réparation et de la restitution de la dette. Juste une évocation du rappel de l’histoire, du devoir de solidarité de la France et de la nécessité de coopérer : «Enfin, le président de la République a indiqué que notre passé commun avec Haïti ne doit pas être oublié. Il est de la responsabilité de la France de faire vivre la mémoire de l’esclavage sur l’ensemble du territoire national comme en Haïti. Des initiatives communes mémorielles, culturelles, économiques et éducatives seront développées en ce sens. Les Haïtiens sont de grands enfants qu’il faut tenir par la main… pour leur montrer le chemin de leur autonomie».
source : TRT Global

Le 19 décembre, James Foley, ambassadeur des États-Unis en Haïti de 2003 à 2005, a publié une éditorial explosif dans le Miami Times, un journal farouchement anticommuniste. Il y déplore que le pays soit devenu une «bombe à retardement», avec des centaines de milliers de réfugiés menaçant d’émigrer aux États-Unis, «une montée de la violence des gangs», le désengagement des «organisations d’aide humanitaire» en raison de «menaces», et des entités «criminelles» «sur le point» de s’emparer entièrement de Port-au-Prince. Son remède est simple : une «intervention» directe des États-Unis pour assurer le contrôle local et réaffirmer la «primauté de Washington dans l’hémisphère».
En tant qu’homme de la CIA à Port-au-Prince au début du millénaire, Foley était en première ligne du coup d’État brutal qui a chassé du pouvoir le président anti-impérialiste populaire et légitimement élu Jean-Bertrand Aristide, et entraîné les horreurs qui s’en sont suivies. Comme l’a mis en évidence en février Jeb Sprague, journaliste et chercheur universitaire sur Haïti, le renversement d’Aristide a été orchestré par l’Agence [USAID], en coordination directe avec les éléments les plus extrêmes et meurtriers de l’opposition locale. Cet événement tragique a entraîné le pays dans une descente aux enfers cauchemardesque qui perdure encore aujourd’hui.
Jean-Bertrand Aristide
Les massacres de civils innocents font désormais partie du quotidien en Haïti, la société civile est inexistante et les grandes puissances exploitent le chaos pour tester des techniques de répression et de pacification qui seront ensuite déployées ailleurs. Pourtant, on peut identifier un élément fondamental de cette misère nationale jusque-là passé sous silence. En septembre 2004, le Bureau des initiatives de transition de l’USAID, qui a déclaré «promouvoir les intérêts de la politique étrangère américaine (…) en saisissant les opportunités émergentes» – en d’autres termes, superviser les changements de régime – a déployé des vétérans de l’Armée de libération du Kosovo à Port-au-Prince :
«Des spécialistes de la formation et de la gestion du Corps kosovar de protection, une unité d’intervention civile composée principalement d’anciens membres de l’Armée de libération du Kosovo, ont été envoyés en Haïti pour évaluer comment le modèle kosovar pourrait y être appliqué».
L’UCK était une milice narcoterroriste sadique, ciblant les civils et pratiquant le prélèvement d’organes, soutenue par la CIA et le MI6, qui a mené pendant des années une insurrection sauvage en Yougoslavie. Son objectif était de forger un Kosovo ethniquement pur, au service du rétablissement de la Grande Albanie de l’ère nazie. Une fois que les forces yougoslaves ont quitté la province à la suite d’une campagne de bombardement de l’OTAN de trois mois contre Belgrade en juin 1999, l’UCK a commencé à perpétrer un génocide total des habitants locaux non albanais, tuant d’innombrables Bosniaques, Roms, Serbes et autres minorités, tout en poussant les survivants à fuir.
Des militants de l’UCK arborent des drapeaux albanais au Kosovo, septembre 1999
Les Albanais étaient eux aussi souvent dans la ligne de mire de l’UCK, qu’ils soient des criminels rivaux, des soutiens de la Yougoslavie multiethnique ou de simples opposants à la barbarie excessive de cette faction meurtrière. L’UCK a été largement protégée des répercussions juridiques de sa monstrueuse et cruelle croisade par décrets américains. Cependant, l’acte d’accusation de 2005 contre Ramush Haradinaj, alors Premier ministre du Kosovo, et son adjoint Idriz Balaj, tous deux d’anciens membres haut placés de l’UÇK, détaille le sort habituellement réservé à ceux qui ont croisé le chemin d’Al-Qaïda. Après avoir capturé trois membres d’une famille rom et coupé le nez de l’un d’eux,
«Idriz Balaj a infligé à chacun des trois hommes des coupures au cou, aux bras et aux cuisses, a frotté du sel sur les coupures et les a recousues à l’aide d’une aiguille. Idriz Balaj les a ensuite emballés dans du fil de fer barbelé et s’est servi d’un outil pour enfoncer les barbes du fil dans leur chair. Idriz Balaj a également poignardé l’un d’entre eux dans l’œil. Les trois hommes ont ensuite été attachés derrière le véhicule d’Idriz Balaj et traînés… Ils n’ont pas été revus vivants depuis ce jour et sont présumés morts».
Haradinaj a été accusé d’une multitude de crimes tout aussi horribles, notamment de viols multiples, et d’avoir personnellement planifié et supervisé le génocide frénétique et ultraviolent de l’UCK au Kosovo après les bombardements. En novembre 1999, les «meurtres et enlèvements» de l’UCK dans la province yougoslave occupée par l’OTAN ont réduit la population serbe de Pristina de 40 000 à seulement 400 personnes. Pourtant, Haradinaj n’a passé que deux mois en prison. Curieusement, il aurait été largement présenté comme le «principal atout de l’UCK en matière de renseignement et d’armée américaine» pendant les bombardements de l’OTAN.
«Le modèle du Kosovo»
L’UCK a été formée à sa sauvagerie sans bornes par les militaires et les services de renseignement britanniques et américains, ainsi que par des sous-traitants, dont le tristement célèbre MPRI. Le Corps de protection du Kosovo, son successeur désigné par l’ONU, était chargé d’intervenir le premier dans certains contextes, mais il lui était formellement interdit d’exercer des fonctions de maintien de l’ordre, en raison de l’histoire sordide de son organisation mère, marquée par une violence sectaire atroce. Il était censé être désarmé, mais cela ne s’est jamais concrétisé. Ce groupe constituait la dernière entité à consulter pour rétablir la stabilité dans une Haïti post-coup d’État en proie aux troubles.
Pourtant, Washington a longtemps planifié de «transformer l'[ALC] d’une bande hétéroclite de guérilleros en une force politique». Étonnamment, nul autre que le futur ambassadeur en Haïti, James Foley, était à l’avant-garde de ces actions. En tant que haut fonctionnaire du département d’État pendant les bombardements criminels de l’OTAN sur la Yougoslavie, il est allé plus loin que tout autre apparatchik américain en se félicitant ouvertement des liens étroits de Washington avec la milice meurtrière, mais aussi en reconnaissant que l’UCK était en train de devenir un acteur de la gouvernance au Kosovo d’après-guerre :
«Nous voulons développer de bonnes relations avec eux alors qu’ils se transforment en une organisation à vocation politique… [L’UCK] pourrait ainsi progresser dans sa quête d’autonomie gouvernementale dans un ‘contexte autre’. Si nous pouvons les aider et qu’ils veulent que nous les aidions dans ce processus d’évolution, je pense que personne ne peut s’y opposer».
Foley a fait ces commentaires en février 1999, avant le début de l’assaut de l’OTAN contre la Yougoslavie. De toute évidence, même à ce stade précoce, lui et d’autres responsables américains voyaient le Kosovo devenir une colonie américaine, avec les forces de l’UCK aux commandes, éliminant brutalement quiconque et quoi que ce soit faisant obstacle à Washington. C’est précisément ce qui s’est produit. La nomination de Foley au poste d’ambassadeur des États-Unis à Port-au-Prince en mai 2003 témoigne peut-être aussi de la vision inquiétante de certains acteurs sur ce qui allait bientôt se produire en Haïti.
La destitution d’Aristide n’aurait jamais été prise à la légère par ses soutiens locaux, notamment parce que son éviction aurait inévitablement déchaîné des groupes criminels, militants et fascistes dangereux qui les auraient pris pour cible. Parmi eux, les partisans de la marionnette américaine François Duvalier, qui a dirigé Haïti de 1957 à 1971 en tant qu’État policier brutal, via d’abominables unités d’espionnage et de terrorisme. Ce réseau machiavélique a été réduit en miettes par Aristide, avec un soutien public quasi total. En conséquence, de nombreux Haïtiens ont opté pour l’autodéfense, se sont armés et se sont préparés à affronter les problèmes, le cas échéant.
Par conséquent, nous pouvons supposer qu’une répression brutale des soutiens d’Aristide a été considérée comme certaine et planifiée par les États-Unis près d’un an avant le coup d’État de février 2004. Les KLA, si chers à Foley, étaient des candidats idéaux non seulement pour planifier un tel bain de sang, mais aussi pour aider à transformer les factions rebelles paramilitaires haïtiennes soutenues par Washington en unités policières et militaires officielles, afin de mener de violentes campagnes de répression contre des groupes cibles spécifiques, sous couvert d’une légitimation. Tel était le «modèle du Kosovo» que l’USAID a cherché à appliquer à Port-au-Prince, après Aristide.
«Une nation violente»
C’est ainsi qu’en janvier 2004, lors d’une célébration du bicentenaire de l’indépendance d’Haïti de la France, boycottée par l’Occident, à laquelle participaient Aristide et des invités, dont le président sud-africain Thabo Mbeki, des putschistes locaux sont intervenus pour perturber le rassemblement, en recourant à la violence brute. Ce fut l’étincelle qui déclencha le coup d’État de la CIA à Port-au-Prince, un mois plus tard. Selon un câble diplomatique américain ayant fait l’objet d’une fuite, le coup d’État a été orchestré par l’Agence en collaboration avec des «individus douteux», tels que l’oligarque local lié aux paramilitaires Hugues Paris.
Aristide a été rapidement kidnappé par les forces américaines, puis emmené en Afrique du Sud. Ses réformes sociales modérées, mais révolutionnaires dans le contexte, ont été immédiatement abrogées, et Haïti s’est soudainement transformé en un État en faillite. Des forces paramilitaires barbares ont fait des heures supplémentaires pour réprimer l’opposition publique, en particulier celle des soutiens du président renversé. Pendant ce temps, des milliers de «soldats de la paix» de l’ONU et des États-Unis, soi-disant déployés pour maintenir l’ordre et empêcher les massacres de civils, ont été directement impliqués dans ces massacres. La même terrible histoire s’est déroulée au Kosovo, après juin 1999, grâce à l’UCK.
Les «soldats de la paix» de l’ONU patrouillent en Haïti après le coup d’État
Le prestigieux Lancet Medical Journal a découvert qu’environ 8000 personnes ont été assassinées à Port-au-Prince dans les deux ans qui ont suivi le coup d’État de février 2004. En l’espace d’un mois seulement, 1000 corps ont été enterrés dans une fosse commune. Simultanément, les structures étatiques haïtiennes ont été purgées de tous les fonctionnaires restés fidèles à Aristide et à ses programmes progressistes. Les licenciements massifs dans les administrations publiques et la brutale répression des syndicats étaient monnaie courante. Les journalistes dissidents encouraient l’arrestation, voire le meurtre. Les médias pro-Aristide ont été contraints de fermer, généralement sous la menace des armes.
La faction paramilitaire du Front national de libération et de reconstruction d’Haïti était à l’avant-garde du coup d’État à Port-au-Prince. Immédiatement, les médias occidentaux ont commencé à présenter cette faction barbare comme le prochain gouvernement d’Haïti. En avril 2004, Guy Philippe, pilier de longue date de l’opposition à Aristide et chef du FLRN, a déclaré au Miami Herald que son premier acte au pouvoir, s’il était élu, «serait de rétablir» l’armée haïtienne, afin de «sécuriser cette nation violente». Ce qui, espérait-il, encouragerait également les oligarques étrangers à faire fortune à Port-au-Prince :
«Ce serait une armée professionnelle, pas celle que nous avions… On ne peut pas faire investir des étrangers sans garantie de sécurité».
Le même article indiquait que les éléments ultra-violents qui ont joué un rôle central dans l’éviction d’Aristide «remettront leurs armes à la police le mois prochain». On peut supposer que c’est précisément ce que l’UCK n’a pas fait. Ces factions rebelles belligérantes ont ensuite été rebaptisées presque à l’identique en parti politique, le Front de reconstruction nationale. La soumission de la presse à Philippe n’aurait pas pu être plus claire. Le Miami Herald a qualifié le meurtrier de masse d’«extrêmement populaire», tout en louant son «charisme juvénile» et en reconnaissant ses liens personnels avec le «trafic de drogue».
Cependant, lors des élections présidentielles de février 2006 en Haïti, Philippe n’a remporté que 1,97% des voix. Le FRN a obtenu un résultat similaire lors des élections sénatoriales simultanées, ne disposant ainsi d’aucun représentant élu. Aujourd’hui, lui et son parti sont pratiquement tombés dans l’oubli. Entre-temps, le chaos semé par la CIA et entretenu par l’UCK il y a 20 ans en Haïti n’a fait que s’intensifier. Et aujourd’hui, Washington dispose du prétexte idéal – et d’une justification juridique auto-rédigée – pour lancer une invasion totale.
source : Global Delinquents via Spirit of Free Speech
Derrière le décor en feu, l’Empire décomposé

Elena Karaeva journaliste russe se fait l’interprète de ce que pense le Sud global du spectacle. L’Amérique ne fascine plus depuis longtemps, désormais en révélant ses tares elle provoque le mépris.
Régis de Castelnau
*
par Elena Karaeva
L’un des quartiers les plus chers de Los Angeles est en flammes. Les flammes ont déjà consumé des milliers de maisons valant des dizaines de millions de dollars chacune. Des écoles privilégiées, des cliniques incroyablement chères et des magasins tout aussi chers brûlent. Plusieurs centaines de milliers de personnes ont été évacuées de force, et les autres ont été complètement privés de gaz, d’eau et d’électricité. Les téléphones portables ou toute autre connexion ne fonctionnent pas. Des pillards fouillent les cendres. Les lois ne s’appliquent pas. Les règles encore moins. Le Far West est revenu à ses anciennes mœurs, plus caractéristiques que le politiquement correct imposé. C’est pourquoi le nombre de personnes brûlées vives est annoncé à contrecœur et avec réserve : «on le sait actuellement». Le fait que la liste des victimes ne soit pas définitive (il y aurait pour l’instant 24 personnes répertoriées) est clair pour tout le monde, même sans ces astuces.
L’impensable s’est produit pour l’Amérique : l’argent, et même des sommes scandaleusement énormes, le bien-être et la richesse ont cessé d’être une mesure de sécurité face à une catastrophe naturelle majeure. Mais – et c’est l’envers de la médaille – il s’est avéré en même temps que, à part dépenser des milliards inutiles, les Américains ne savent rien faire d’autre. Ils n’ont aujourd’hui ni courage, ni cohésion, ni capacité d’entraide, ni compassion.
L’histoire d’un paralytique qui a fui un incendie le long d’une autoroute en fauteuil roulant, conduisant pendant une heure jusqu’à ce qu’il atteigne une station-service et le motel le plus proche, est une illustration pour ceux qui croient encore à «l’entraide américaine».
Les incendies de Los Angeles ne brûlent pas seulement les gens, leurs animaux de compagnie et leurs biens. En ce moment, ce qui brûle d’un feu ardent, c’est le rêve américain de la façon dont ce pays entend redevenir grand. Car écrire un slogan coloré et non contraignant sur des casquettes et des tee-shirts est une chose. Mais faire les choses en est une autre. Cette Amérique, qui «entend redevenir grande», ses plus de trois cents millions d’habitants et ses deux présidents, entrant et sortant, sont incapables de contrôler les incendies, ou même de les contenir ! Car une telle Amérique, collectivement et individuellement, n’a rien qui le permette : pas de réserves humaines, pas de technologie, pas de capacité de planification. Il n’y a pas d’eau, ni douce ni salée, malgré un océan à proximité. Il n’y a aucun moyen d’évacuer les gens des zones sinistrées de manière organisée, ou même simplement de les aider.
Le moment de vérité n’est pas venu pour les Américains, ni au moment où la presse le leur annonçait, ni au moment où ils sont allés aux urnes, au début du mois de novembre dernier. Pas plus que le 20 janvier prochain. Face au danger qui menace la vie de leurs compatriotes et leurs propres biens, les Américains se sont montrés étonnamment lâches et tout aussi indifférents.
L’Amérique d’aujourd’hui c’est l’expression du visage de Ben Affleck, star de cinéma richissime et oscarisé, contemplant l’action avec détachement, assis au volant de la Jeep à la mode. Indifférent à toute action, à n’importe quelle action, à n’importe quelle solution.
La trahison des promesses est la principale tendance politique américaine de ces derniers temps. Le gouverneur de Californie Newsom fait semblant d’ignorer le désastre total qu’il représente pour la sécurité de ses propres électeurs. Dans la plus grande ville de l’État sous sa juridiction, les pompiers sont dirigés par des personnes qui vivent exclusivement avec un agenda LGBT, et leurs collègues tout aussi engagés politiquement vident délibérément les réservoirs d’eau pendant la sécheresse. Le gouverneur lui-même se soucie de la «biodiversité», de la protection du poisson éperlan, et la presse – la même, ultra-démocratique, jamais sans censure et super libre – fait l’éloge de ces deux phénomènes, et d’autres encore, et d’autres encore. Elle, cette presse, impute tout aux rafales de vent et à la chaleur. Facteurs qui s’additionnent pour former une image confortable du «changement climatique». La réponse est universelle pour tout cataclysme, qu’il soit naturel, ou provoqué par l’homme.
Les Américains eux-mêmes, si riches, si remplis de tout ce qui est beau et à la mode, avec leurs maisons pleines d’appareils électroménagers divers et modernes, et oui, si libres, «jamais esclaves», ont peur de dire quoi que ce soit à haute voix contre ce courant dominant.
Ce sont eux qui nous menacent et qui rêvent de nous vaincre stratégiquement et tactiquement. Ce sont eux qui écrivent, parlent et diffusent des mensonges sur nous depuis des années. Ce sont eux qui nous calomnient depuis des décennies, nous qualifiant d’«agresseurs», d’«esclaves» et d’«ennemis de la démocratie». Ce sont eux qui nous ont imposé des sanctions et des restrictions. Ce sont eux qui ont sapé les fondements de notre État, quel que soit son nom et sa structure économique. Ce sont eux qui pensaient que nous devions «connaître notre place», qui nous ont délibérément placés en dehors de la carte géopolitique du monde, en essayant de nous marginaliser et de nous diaboliser.
Ces gens croyaient et croient encore qu’ils ne sont pas des sauvages. Alors qu’ils ne sont pas capables d’éteindre les incendies de forêt et ne sont pas prêts en principe à serrer les rangs face à une catastrophe commune, n’apportant aucune aide même aux plus faibles et aux plus vulnérables.
Cela fait longtemps que nous ne nous soucions plus vraiment de leur position.
Mais en ce moment, à la télévision en direct, ils ont montré toute leur lâcheté, toute l’incapacité sans fin de faire quoi que ce soit pour aider les victimes, organisant au lieu de cela des altercations indécentes sur les réseaux sociaux, discutant démocratiquement de la façon d’éteindre les incendies (avec du sable ou de l’eau), au lieu d’aider les victimes.
Le symbole de l’Amérique d’aujourd’hui n’est pas un super-héros hollywoodien victorieux avec l’apparence de Ben Affleck, mais des femmes pompiers qui sont embauchées en raison du quota de genre approprié et qui éteignent des manoirs de plusieurs millions de dollars en versant l’eau restante de la plomberie domestique dans leur sac à main.
source : Vu du Droit