par Harry E. Jean-Philippe
Haïti a toujours été un objet de préoccupation d’ordre stratégique pour les États-Unis d’Amérique qui ont littéralement tué toutes velléités hégémoniques chez les dirigeants allemands de la fin du XIXe et première moitié du XXe siècle.
La destruction physique et matérielle de Nordstream I et II vient de prouver, une fois de plus – s’il en était besoin – que le déploiement des troupes étrangères coûte énormément aux peuples indigènes qui ne finissent pas d’en payer les frais.
L’Allemagne pour grande qu’elle fut n’en fait pas exception !
En Haïti, on a des problèmes. Mais une intervention militaire étrangère de plus est loin d’être la solution. Ce n’est ni Justin Trudeau du Canada, ni Lula du Brésil qui en diront le contraire !
Intervention étrangère ! Les Haïtiens en sont familiers. Ils en ont vu de toutes les couleurs. Ils en ont connu autant qu’ils connaissent de misères !
La vérité est que, depuis la 2ème moitié du XXe siècle, ce peuple vaillant fait face à des moments de troubles socio-politiques intenses, des périodes d’instabilité chronique, des crises économiques, financières et monétaires qui ne vont pas se dissiper comme du beurre au soleil avec une nouvelle intervention militaire étrangère.
À quoi bon donc faire ou refaire les mêmes expériences qui vont donner les mêmes résultats lamentables pour les mêmes raisons que l’on sait ? Le secrétaire général de l’Organisation des Nations unies, Mr António Guterres, ferait mieux de se raviser ! Comme lui et ses alliés ne sont pas des cons et qu’ils savent pertinemment ce qu’ils font, l’objet de notre démarche consiste à demander à la Fédération de Russie et à la République populaire de Chine de faire usage de leur droit de véto au Conseil de sécurité pour le plus grand bien de l’humanité, en général, et particulièrement pour celui de 12 millions d’Haïtiens à qui on dénie le droit de vivre en paix sur leur terre. À ces heures fatidiques de l’Histoire, notre peuple a besoin de tout, sauf une autre intervention militaire étrangère !
Si l’effondrement de l’État haïtien l’avait rendu possible, voire désirable dans certains milieux, le débarquement des blancs ou l’occupation militaire de 1915 à 1934 ne servait exclusivement que les intérêts hégémoniques des Yankees qui voulaient, à tout prix, mettre fin à la prépondérance allemande dans la partie Ouest de l’île.
Les deux autres interventions étrangères (1994 et 2004) vont fondamentalement suivre le même modèle : consolider les intérêts hégémoniques des États-Unis d’Amérique en Haïti. À bien remarquer qu’aucune de ces invasions militaires n’a apporté ni la paix durable ni le développement durable, encore moins le bonheur aux dignes héritiers des marrons qui pataugent encore dans leurs calamités.
Le prochain déploiement (s’il y en aura) ne sera pas différent dans ses intentions profondes, inavouées et inavouables : Haïti doit rester figée dans sa litanie de misères et de grands malheurs publics pour apaiser les inquiétudes américaines et tuer dans l’œuf toutes velléités de soulèvement général ou de Révolution, à l’heure où le monde en ébullition est favorable à l’émergence d’un nouvel Ordre, plus juste et plus humain.
Le tandem russo-chinois autorise donc un regain d’optimisme parmi les peuples considérés à tort comme «les damnés de la Terre». C’est le tandem de l’Espérance pour les Haïtiens éveillés dont je suis le porte-voix.
Il faut saisir l’occasion pour en appeler à une voix plus large pour l’Afrique dans les organisations internationales. À ce propos, la position de l’Afrique du Sud au sein des BRICS constitue un pas de géant dans la bonne direction.
Du même coup, on doit exhorter les frères Kényans à rejeter catégoriquement le rôle de sous-traitant que les grandes puissances occidentales voudraient bien leur assigner dans le dossier haïtien. Encore une fois, par la manipulation des nègres interposés, ces grands décideurs internationaux veulent maintenir leur hégémonie et faire durer le plaisir de l’application de leurs politiques néo-coloniales dans la première République noire indépendante du monde.
Mr le président William Ruto du Kenya, les Haïtiens éveillés ne sont absolument pas dans la contemplation d’une nouvelle force étrangère sur leur territoire. Ce dont ils ont besoin, maintenant, c’est la sécurité, le commerce et les investissements. La présence militaire étrangère ne saurait servir en rien les aspirations profondes du peuple haïtien. Les multiples missions onusiennes qui ont défilé dans le pays pendant ces 30 dernières années, laissant derrière elles un cortège de malheurs et un État failli sont là pour le prouver !
Même l’armée la plus puissante au monde n’est pas dotée d’une potion magique ou d’une solution miracle qui pulvériserait la ténacité des structures archaïques et arriérées de l’environnement local. La force de frappe des missiles balistiques est combien trop faible pour briser le cynisme sans borne des élites pour lesquelles la régénération urgente des masses rurales et urbaines reste le cadet de leurs soucis.
Il est important de souligner que Mr Ariel Henry dont on ignore encore quelle loi, quel article ou quel artifice juridique lui permettent de s’accrocher à la Primature depuis deux ans n’a absolument aucune légitimité pour engager la nation dans une telle aventure. Cet homme politique incolore, inodore et sans saveur n’a pas été capable d’un consensus minimal pour débloquer la situation socio-politique et économique du pays. Faut-il le rappeler : son nom est Ariel Henry, et non pas le roi Henry IV ?
On reconnaîtra volontiers que la violence constitue le fondement même du système politique haïtien. Ces racailles veulent maintenant substituer à la violence des gangs celle des troupes étrangères. Ces élites qui ont créé le monstre qu’elles ont du mal à contrôler sont maintenant dans la contemplation du déploiement de troupes étrangères dans le pays. Comme des cerfs altérés brament après le courant des eaux, ainsi soupirent leurs âmes après une nouvelle Occupation militaire (robuste) qu’elles appellent de tous leurs voeux.
Ce sont ces élites sans lecture, sans écriture, sans grandeur, sans pudeur, sans perspective historique qui disent dans leurs prières, une fois la nuit tombée : «O douce intervention étrangère, quand donc sera-ce que nos yeux verront ta face ?»
Devant leur incapacité criante et humiliante, le Dr Ariel Henry et ses collabos rêvent du chaos comme une porte de sortie. Ils estiment que la banqueroute nationale pourrait bien leur servir d’échappatoire. Aussi bizarre que cela puisse paraître, ces Conzés du XXIe siècle travaillent d’arrache-pied à l’effondrement de l’État, pavant ainsi la voie à une troisième Occupation militaire du territoire national en 30 ans.
Par ailleurs, les Haïtiens éveillés ont compris la nécessité de s’associer à de nombreux pôles. Les pressions intenses et les menaces constantes ont la seule mission de nous garder dans l’isolement. Cependant, c’est notre détermination qui en est sortie renforcée. Nul au monde nous fera croire que la Russie est le méchant historique qui rejette le droit international en ne respectant pas la souveraineté des autres pays.
Après plus de 200 ans d’Histoire, il est triste de constater que le néo-colonialisme, dans sa forme la plus hideuse, est bel et bien présent dans le pays. C’est lui qu’on entrevoit à travers le support inébranlable et inconditionnel accordé au Dr Ariel Henry dans l’accomplissement de ses oeuvres les plus basses.
Dieu merci, la Fédération de Russie et la République populaire de Chine n’ont point d’héritage colonial en Haïti. On sait que l’URSS n’a pas marchandé son soutien aux peuples d’Afrique dans leur lutte héroïque pour l’Indépendance. La Russie de Poutine a poursuivi cette politique de soutien et d’assistance à l’Alma Mater.
C’est fort de cette conviction, basée sur des faits historiques solides, que nous implorons le support de ceux qui ne nous ont jamais colonisés pour qu’ils fassent usage de leur droit de véto au Conseil de sécurité de l’ONU dans le traitement du dossier haïtien. Déjà, avec un cœur de gratitude, nous adressons nos remerciements à la Russie, à la Chine et à tous ceux qui comprennent qu’il n’y a pas d’incompatibilité entre le bien-être d’Haïti et celui des autres.
source : Radio Peyisan