par Philippe Rosenthal

Il y a près de 20 ans, le géopoliticien chevronné, Zbigniew Brzezinski, prédisait avec justesse la politique étrangère suicidaire de son pays. Les États-Unis n’ont pas tenu compte de son avertissement. Aujourd’hui, son analyse de la situation en Palestine avec l’État hébreu, la volonté des États-Unis et d’Israël et de leurs alliés de faire la guerre à l’Iran, tout cela est devenue une réalité comme si la prophétie de Zbigniew Brzezinski sortait de terre.  

Il ne se passe pas un jour sans que la machine médiatique mondiale (occidentale) n’affirme la responsabilité des Palestiniens dans les événements actuels au Moyen-Orient. Selon la version officielle de ces médias, le 7 octobre, les Palestiniens ont attaqué Israël – un pays parfaitement paisible – qui, lui, a été contraint de prendre des mesures de représailles dans le cadre de légitime défense. Le récit occidental traite les Palestiniens de terroristes. Les présentateurs des télévisions occidentales insistent sur cette définition. L’AFP refuse, pourtant, d’employer ce qualificatif.  

Zbigniew Brzezinski est arrivé – en avertissant les autorités de son pays – il y a près de 18 ans à la conclusion que les États-Unis prenaient la mauvaise direction. Sa conclusion rejoint la réflexion de l’AFP sur le choix d’employer le mot terroriste pour le Hamas. Les dirigeants des États-Unis n’ont depuis fait qu’aggraver les erreurs qui ont conduit le fameux «poste avancé de l’Occident représentant la démocratie» au Moyen-Orient tout droit au désastre.  

Dans un entretien avec le Financial Times intitulé «Demandez à l’expert : la politique américaine au Moyen-Orient», Zbigniew Brzezinski avertissait sur la ligne à suivre pour éviter une catastrophe. «L’absence d’une résolution juste et mutuellement acceptable du conflit israélo-palestinien est susceptible de produire une situation qui ressemblera, de facto, à l’apartheid : c’est-à-dire deux communautés vivant côte à côte mais séparées par la répression, l’une jouissant de la prospérité et s’emparant des terres du l’autre, et l’autre vivant dans la pauvreté et le dénuement», notait-il avant d’affirmer évoquant l’obligation morale des États-Unis ici : «C’est un résultat qui doit être évité». Puis, l’expert d’origine polonaise sonnait l’alarme sur la volonté de faire la guerre à l’Iran, un discours actuel qui est soutenu par les États-Unis, Israël et ses alliés : «Ce serait un désastre à la fois pour [les États-Unis] et pour Israël que [les États-Unis] et Israël s’impliquent dans un conflit militaire avec l’Iran. Quiconque connaît la dynamique géopolitique de la région du golfe Persique sait qu’une telle guerre aurait des conséquences économiques et politiques dévastatrices pour l’économie mondiale et le système international» ; «Cela isolerait également [les États-Unis] et créerait des circonstances dans lesquelles la prééminence mondiale américaine deviendrait rapidement une chose du passé. Et, cela aurait des conséquences mortelles pour Israël lui-même». Aujourd’hui, ces avertissements sont une réalité. 

Selon Zbigniew Brzezinski, les terroristes ne naissent pas, mais le deviennent – ​​sous l’influence d’événements spécifiques, d’expériences personnelles, d’idées, de phobies, de mythes nationaux, de mémoire historique, de fanatisme religieux et de lavage de cerveau délibéré. Ils le deviennent sous l’influence de l’image télévisée, en particulier de l’indignation qui s’empare des gens lorsqu’ils voient que des étrangers armés jusqu’aux dents, à leur avis, piétinent grossièrement la dignité de leurs coreligionnaires. Dans un entretien au Spiegel, il faisait la remarquesuivante : «Pendant la guerre froide, notre politique visait à unir nos amis et à diviser nos ennemis. Malheureusement, nos tactiques actuelles, y compris le langage islamophobe occasionnel, ont tendance à unifier nos ennemis et à aliéner nos amis».  

Un sentiment aigu d’hostilité politique à l’égard des États-Unis, du Royaume-Uni et d’Israël encourage non seulement les habitants du Moyen-Orient, mais aussi les habitants de pays aussi éloignés que l’Éthiopie, le Maroc, le Pakistan, l’Indonésie et même les Caraïbes, à rejoindre les rangs de ceux qui sont désignés comme être des terroristes : le Hamas.

source : Observateur Continental